«Les joueurs sont inquiets». Si la Premier League espère avancer lundi en vue d'un redémarrage de la saison en juin, l'idée est très loin de faire l'unanimité chez les footballeurs, partagés entre crainte face au coronavirus et volonté de rejouer.
Tout le monde reconnaît l'impact financier désastreux d'un abandon de la saison, mais les dirigeants de la Premier League se sont engagés à consulter les joueurs alors que l'assemblée générale prévue lundi pourrait être décisive. L'un des footballeurs les plus virulents contre le scénario d'une reprise de la compétition a été l'attaquant et capitaine de Watford, Troy Deeney.
«Je ne parle même pas de football pour le moment. Je parle de la santé de ma famille», a-t-il écrit sur Instagram. «Je ne vais pas mettre ma famille en danger. Qu'est ce qu'ils vont faire, me prendre de l'argent? J'ai déjà été fauché par le passé, ça ne me dérange pas», a-t-il poursuivi.
Une position consolidée par le fait que Watford a été l'une des rares équipes à accepter rapidement une réduction temporaire des salaires. Il s'agit même de la plus forte de toute la Premier League (30%), selon la presse.
«La vie des gens est en jeu»
«Ils parlent de ne plus jouer devant des supporters avant 2021. Si ce n'est pas assez sûr pour les supporters, pourquoi est-ce que ça le serait pour nous?», a interrogé Deeney.
Les tests réguliers promis aux joueurs et aux staffs n'empêcheront pas le virus de circuler, alors que seul un vaccin, encore loin d'être au point, doit effacer ce risque. «Je crois que le sentiment général, c'est que les joueurs sont inquiets», a résumé Grant Hanley, capitaine de Norwich, au micro de Sky Sports. «Ma copine est enceinte, c'est pour début juillet, donc c'est évidemment une source d'inquiétude pour moi.»
Avant eux, deux stars de Manchester City, Sergio Agüero et Raheem Sterling avaient aussi fait part de leurs craintes, rejoints par le latéral de Tottenham, Danny Rose, en prêt à Newcastle, dans une diatribe contre le gouvernement. «Ils disent 'faisons revenir le football' parce que ça remontera le moral de la nation. Je n'en ai rien à foutre du moral de la nation, mec, c'est la vie des gens qui est en jeu», a lancé Rose dans une vidéo en direct sur Instagram.
«On ne devrait même pas parler de retour du football tant que les chiffres (des victimes) n'ont pas baissé», avait-il ajouté.
Kane a «hâte»
À l'opposé de cette colère, le capitaine de l'équipe d'Angleterre, Harry Kane, s'est montré beaucoup plus ouvert à une reprise. «Je pense que la majorité des joueurs a hâte de jouer à nouveau dès que possible, mais nous voulons aussi que ce soit le plus sécurisé possible», a-t-il commenté dans une émission de télévision matinale.
«Personnellement, je serai heureux de reprendre l'entraînement en petits groupes quand ce sera autorisé et d'essayer de revenir à une certaine normalité dès que possible», a complété l'avant-centre de Tottenham.
«Je suis prêt à jouer demain si c'est sûr» sur le plan sanitaire, a aussi clamé l'attaquant de Chelsea, Tammy Abraham, qui a tout de même confié quelques craintes. «Retourner sur le terrain, ce serait important pour moi. Mais mon père a de l'asthme et la dernière chose à faire serait que j'attrape le virus ou que je sois en contact avec quelqu'un qui l'a», a-t-il précisé.
D'autres, comme l'ancien milieu de Manchester City Joey Barton, ont été prompts à dénoncer des intérêts égoïstes chez les anti-reprises. «Si Troy (Deeney) ne veut pas jouer, c'est son choix. Mais ne soyons pas dupes de ce qui se passe», a tweeté l'actuel entraîneur de Fleetwood (D3), allusion au classement de la Premier League: actuellement 17e et premier non-relégable, Watford pourrait être le grand bénéficiaire d'une annulation de la fin de saison.
«Il y a beaucoup d'argent à se faire en Premier League. Qui n'en voudrait pas alors que la fin de carrière approche? On ne peut qu'admirer son opportunisme», a asséné Barton, connu pour ses coups bas sur et en dehors du terrain.