Ne pas perdre contre l'Espagne (1-1), c'est très bien pour la Suisse. Mais celle-ci, si elle veut valider ses principes et se maintenir en Ligue A, est contrainte de confirmer contre l'Ukraine mardi à Lucerne.
Les résultats ne disent pas tout. Evidemment, l'équipe de Suisse est dans une série noire. C'est vrai, elle en est à sept rencontres sans victoire. Mais s'il y en a une à prendre, ce sera bien lors du dernier match de cette année 2020 si particulière, si courte, contre l'Ukraine. La Suisse aura alors rempli tous ses objectifs: comptables avec le maintien dans l'élite de cette Ligue des nations, mais surtout ceux qui ont trait à son évolution et sa progression.
Pour y parvenir, il faudra une fois de plus agir, «livrer la marchandise». C'est le capitaine Granit Xhaka qui le tonnait avant la rencontre contre l'Espagne. Cela vaudra encore trois jours plus tard. Mais la première livraison, samedi à Bâle, a donné une certaine idée de la qualité du produit.
On pourra tout arguer: il n'y a eu que 1-1, Yann Sommer a dû sortir le grand jeu en repoussant deux penaltys d'un Sergio Ramos pas franchement habitué à les manquer, l'étreinte de la Roja a été particulièrement étouffante pour la Suisse (notamment en seconde période), les hommes de Vladimir Petkovic n'ont pas eu des tonnes d'occasions. Tout cela est vrai. Mais ce qu'il est aussi, c'est que la Suisse est restée fidèle à ses principes, droite dans ses bottes malgré les doutes qui l'ont entourée ces derniers jours.
Apprendre, mais préserver son identité
«Nous avons démontré que nous pouvons rivaliser avec les meilleures équipes, tout en préservant notre identité», se félicitait le Mister après la rencontre. Il y a quelque chose d'indéniable, que même les chiffres attestent: en quatre rencontres contre l'Espagne et l'Allemagne, elle n'a perdu qu'une seule fois (1-0 à Madrid) et elle ne s'est que rarement reniée. Il a parfois fallu y payer le prix de buts offerts à l'adversaire, d'erreurs grotesques. Mais même avec ça, elle n'est toujours pas condamnée.
Parce que l'équipe de Suisse donne le sentiment qu'elle apprend d'elle-même, qu'elle tire les leçons et s'oblige à aller de l'avant, à poursuivre dans la direction qu'elle s'est donnée en corrigeant les détails. Mais en ne changeant rien à ses principes cardinaux. Contre l'Espagne, elle a voulu jouer: repartir depuis derrière, se reposer sur Yann Sommer pour relancer proprement. Elle n'y dérogera pas.
C'est aussi comme ça qu'elle a marqué, avec une superbe finition d'un Remo Freuler toujours plus juste sous le maillot suisse. La construction ne l'était pas moins, avec des mouvements pour ouvrir le milieu espagnol et attaquer sa défense dans la profondeur. «Cela faisait aussi partie du plan, de ce que l'on travaille», a attesté Petkovic. En revanche, lorsque la situation le demandait, Sommer a accepté de prendre moins de risques, en envoyant le ballon dans une zone moins exposée, sans que l'intention soit de s'en débarrasser.
1-0, 2-1 ou avec deux buts d'écart
Sans ballon aussi, la première mi-temps a été très réussie, en alternant pressing haut et bloc médian. C'est à noter, l'Espagne a souvent été gênée par la capacité de la Suisse à fermer l'axe, notamment lorsque Shaqiri a eu la caisse pour marquer à la culotte Busquets.
Les quarante-cinq dernières minutes avaient quelque chose de moins ambitieux, de plus protecteur. C'était contraint et accepté. «Nous avons montré de nouvelles qualités, faisait remarquer le Mister. Nous sommes capables de souffrir et de faire le sale boulot.» La progression, l'élargissement de la palette, encore une fois.
Cette équipe de Suisse se construit. Mais elle évolue encore sur un fil. Il s'est épaissi avec cette prestation contre l'Espagne. Reste qu'à force de clamer son envie de se maintenir en Ligue A, elle s'est mis une pression de résultat et il faudra gagner 1-0, 2-1 ou par deux buts d'écart contre l'Ukraine pour remplir son objectif.
La Suisse voulait son match décisif, elle l'a. C'est évidemment faisable, les hommes d'Andriy Shevchenko sont bien plus abordables sur le papier. Mais ils seront sans doute moins audacieux que l'Espagne. Il faudra donc faire évoluer le plan de jeu pour livrer la marchandise. En espérant que ce produit-là soit aussi de qualité.