Il n'a même pas levé les bras après avoir armé un vingtième ace sur la balle de match. Décrit joliment comme l'espoir venu du froid, Henri Laaksonen a accueilli avec ce flegme qui l'accompagne toujours la première victoire de sa carrière dans un tournoi du Grand Chelem lundi à Melbourne. Deux heures plus tard, il a toutefois concédé être "heureux" de ce succès.
Battu par Lukas Rosol à Wimbledon et par Juan-Martin del Potro à l'US Open lors de ses deux premières apparitions à ce niveau de la compétition - c'était en 2017 -, le Schaffhousois n'a pas laissé passer sa troisième chance. Issu des qualifications à l'Open d'Australie, il a battu sans discussion aucune le Bosnien Mirza Basic (ATP 97) en quatre sets (6-4 7-6 4-6 6-3) pour devenir le vingtième joueur suisse de l'ère Open - c'est-à-dire depuis 1968 - à gagner un tel match. Le fils de Sandro Della Piana est ainsi le dernier membre d'une liste dont le premier joueur à avoir écrit son nom fut Dimitri Sturdza en 1968 à Roland-Garros, où il avait enlevé ses deux premières parties.
Un chèque qui fait du bien
Le chèque de 70'000 francs - auquel il convient de soustraire les impôts à la source - qui récompense cette victoire soulagera les finances d'un tennisman qui, à 26 ans, est très loin de nager dans l'opulence. "Je ne dirais pas que mon année est sauvée sur le plan financier avec cette victoire, dit-il. Mais il est sûr qu'elle fait du bien. L'an dernier, j'avais perdu 60'000 francs sur les cinq premiers mois avant de me refaire grâce à une demi-finale à Bastad, un huitième de finale à Bale et les primes de Swiss Tennis pour la Coupe Davis."
S'il évolue dans le registre qui est le sien depuis le début de son tournoi à Melbourne, les soucis d'argent seront très vite derrière lui. Face à Basic, ce Bosnien qui avait enlevé l'an dernier le tournoi de Sofia à la faveur notamment d'un succès sur Stan Wawrinka en demi-finale, le Schaffhousois a pu compter sur un service - son point faible par le passé - presque "létal" avec ses 20 aces et ses 70 % de réussite sur sa première balle. "Cela fait plus d'un mois que je sers très bien, remarque-t-il. Déjà à Bienne lors des Championnats de Suisse, mon service avait parfaitement fonctionné."
Une année 2018 "horribilis"
Dans le Seeland, Henri Laaksonen avait cueilli le titre pour conclure sur une note positive une année 2018 qu'il qualifie de "horribilis". "J'ai souffert pendant des mois d'inflammations. Elles étaient dues à des allergies, explique-t-il. J'ai ainsi dû arrêter de manger des fruits de mer. Pendant plus de six mois, je n'ai pas pu vraiment m'entraîner." Depuis, il a rattrapé le temps perdu avec une préparation foncière menée à Helsinki et à Bienne avant le départ en Australie.
A Melbourne, Henri Laaksonen est conseillé par un nouveau coach, le Tchèque David Pultr. Les deux hommes doivent désormais préparer ce 2e tour de mercredi contre le no 1 australien Alex de Minaur. Victorieux samedi à Sydney du premier titre de sa carrière, l'espoir de 19 ans sera soutenu par tout Melbourne Park qui veut croire qu'il ne connaîtra pas un destin aussi tourmenté que Nick Kyrgios et de Bernard Tomic. "Avoir le public contre moi ne me gêne pas, assure Henri Laaksonen. Je crois que c'était déjà le cas aujourd'hui sur la fin du premier set avec les supporters bosniens. Bien sûr, j'ai jeté un oeil sur les matches de de Minaur à Sydney. Mais je dois en premier lieu bien me concentrer sur mon jeu, sur mes forces." Avec cette première balle qui claque désormais à merveille, Henri Laaksonen veut croire en ses chances pour mercredi. On ne peut pas lui donner tort.