En marge des Swiss Indoors de Bâle, Marc Rosset dresse en exclusivité pour Teleclub et Bluewin.ch le visage du tennis en 2018 et conseille aux fans de ce sport de profiter un maximum d'un certain Roger Federer.
Les fans de tennis le savent: le monde de la petite balle jaune se trouve actuellement en pleine période de transition. Entre la guerre d'égo que se livrent ouvertement l'ITF et l'ATP, l'émergence de nouvelles compétitions comme la Laver Cup ou l'âge avancé des deux plus beaux ambassadeurs de ce sport - Roger Federer (37 ans) et Rafael Nadal (32 ans) -, la matière à traiter est donc plutôt fournie en cette fin de saison 2018.
Les Swiss Indoors de Bâle sont ainsi l'endroit idéal pour débattre de tous ces thèmes. Et Marc Rosset se trouve être le client idéal. Car le champion olympique 1992 est une bible tennistique. Surtout, il a un avis sur tout. "J'ai envie de dire aux gens de profiter à 2000% de cette période actuelle, d'admirer Roger Federer tant qu'il est encore temps!"
«Nous sommes bénis des dieux que Federer soit Suisse»
Le Genevois (47 ans) ne l'a jamais caché: il est le plus grand admirateur du "Maître"! "Nous sommes bénis des dieux que Federer soit Suisse. Pour moi, il fait partie des dix plus grands sportifs de l'histoire, de part son palmarès et de son aura. De plus, il est notre 'contemporain': on a tous grandi à travers ses succès. C'est fabuleux!"
C'est pourquoi le consultant RTS ne supporte pas les critiques gratuites proférées à l'encontre du Bâlois. "Je peux comprendre la frustration des fans de Federer qui n'aiment pas le voir perdre. Mais dès qu'il perd un match, on entend toujours des gens dire 'il devrait arrêter'. On avait déjà noté cela il y a cinq ans lorsque Roger avait mal au dos et lorsqu'il avait changé de raquette. Mais on est qui pour dire à Federer d'arrêter de jouer au tennis?"
Avant d'enchaîner: "Je n'ai absolument aucune attente de la part de Roger. Il a déjà réalisé tellement de choses pour le tennis. A mon avis, il peut toujours remporter des Grand Chelem. Et même si cela ne devait plus arriver, ce n'est pas grave. Tant qu'il prend du plaisir, c'est l'essentiel."
Car Marc Rosset le sait: d'ici quatre à cinq ans - voire même avant -, le "Maestro" devrait se retirer. "Quand Federer ou Nadal arrêteront de jouer au tennis, cela va faire très mal. On aura tous la gueule de bois, car il n'y a aucune rivalité aussi belle que celle-ci. C'est pourquoi il faut profiter. Mais notre mentalité suisse nous fait presque banaliser la chance que nous avons grâce à Federer et à Wawrinka."
D'ailleurs, ce ne sont pas uniquement les Suisses et les Espagnols qui souffriront de ces retraites. Mais bien l'entier du tennis. "Notre sport ne possède que quatre ou cinq noms banquables. On le voit d'ailleurs ici à Bâle: quand Federer joue, c'est plein. Quand il ne joue pas, le stade est à moitié vide. J'appréhende donc les fins de carrière de Federer et de Nadal... C'est aussi pour cela que le tennis a besoin d'une nouvelle génération qui gagne des tournois du Grand Chelem pendant que le 'Big 4' est toujours présent. Sinon les Zverev et compagnie n'auront pas de crédibilité."
Autre crainte partagée par Marc Rosset, la mentalité de la nouvelle génération. "J'ai effectivement peur que les joueurs soient plus motivés à remplir leurs comptes en banque plutôt que de remplir leurs étagères à trophées. Car, à mon avis, si on ne gagne pas de titres, il n'y a pas de réussite sportive!"
«Le tennis vit une période charnière»
Les hautes instances du tennis que sont l'ITF et l'ATP sont d'ailleurs les principales responsables de ce changement d'attitude chez les joueurs. "Le tennis vit une période charnière. La guerre que se livrent l'ITF et l'ATP m'inquiète. Ces instances devraient plutôt capitaliser sur la période faste que vit actuellement le tennis, une nouvelle fois grâce à Federer et à Nadal."
L'ancien numéro 9 mondial - en septembre 1995 - se veut donc méfiant quant aux nouvelles fulgurances financières. "Il faut préserver une compétition historique comme la Coupe Davis, plutôt que cette dernière ne laisse sa place à une World Team Cup qui n'intéresse les joueurs uniquement pour son cachet. C'était déjà le cas lorsque je l'avais jouée et remportée avec Jakob Hlasek. Je ne me souviens d'ailleurs que de son prize money. Remporter cette Coupe n'avait aucune signification."
Espérons dès lors que les hautes instances tireront les leçons du passé, pour le bien du tennis. Et que la Suisse formera un jour un nouveau Federer. Mais cela ressemble à une mission impossible!