Techno «Alexa j'ai mal»: le service de santé public britannique fait appel à Amazon

AFP

10.7.2019 - 17:05

Les enceintes intelligentes d'Alexa présentées au Consumer Electronics Show, le 11 janvier, à Las Vegas aux Etats-Unis
Les enceintes intelligentes d'Alexa présentées au Consumer Electronics Show, le 11 janvier, à Las Vegas aux Etats-Unis
Source: AFP/Archives

«Alexa, quels sont les symptômes d'une grippe?«: les Britanniques vont désormais pouvoir s'informer auprès du service de santé public NHS par l'intermédiaire de l'assistant vocal d'Amazon, moyen d'aider des médecins débordés mais qui inquiète les défenseurs du droit à la vie privée.

A haute voix en s'adressant aux enceintes intelligentes d'Alexa, les utilisateurs pourront poser des questions, considérées simples par le corps médical, comme: «Alexa, comment je soigne une migraine ?» ou «Alexa, quels sont les symptômes de la varicelle ?»

L'algorithme d'Amazon y répondra par l'intermédiaire de l'assistant vocal après avoir fait sa recherche sur le site du NHS. Mais il ne prodiguera «aucune forme de diagnostic ou de conseil», a insisté le ministère de la Santé.

L'annonce de cette collaboration avec Amazon, souvent accusé de ne pas assez se soucier de la protection de la vie privée, a été faite mercredi par le gouvernement britannique.

«C'est juste un mécanisme alternatif permettant d'accéder aux informations médicalement certifiées du NHS concernant différentes conditions médicales au lieu d'informations provenant de sites américains ou d'autres sources», a expliqué à l'AFP un porte-parole du ministère de la Santé.

- Pas de diagnostic -

Ce nouveau service prodigué par le géant américain doit soulager le personnel du NHS, surmené et lassé des mauvais conseils médicaux qui prolifèrent en ligne.

«Ce genre de technologie est un excellent exemple de la façon dont les gens peuvent obtenir des conseils fiables (...) du NHS dans le confort de leur foyer, réduisant ainsi la pression sur nos médecins et pharmaciens», a jugé le ministre de la Santé Matt Hancock, estimant qu'il serait particulièrement utile aux personnes aveugles ou âgées.

Helen Stokes-Lampard, présidente du Collège royal des médecins généralistes, a salué une «idée certainement intéressante», mais en a aussi souligné les limites.

«Il est vital que des recherches indépendantes soient faites pour garantir que les conseils prodigués sont sûrs», a-t-elle déclaré à l'agence de presse britannique PA.

«Beaucoup de gens ne seront pas en mesure d'assumer les coûts de cet équipement, ce qui creusera encore les inégalités en matière de santé et rendra l'accès aux soins encore plus difficile», a-t-elle par ailleurs déploré.

- «Glouton agressif» -

Le gouvernement a accepté qu'Amazon utilise les informations du site NHS, chose que les entreprises ne peuvent faire sans accord officiel. Cette collaboration avec Amazon est non commerciale et non exclusive, a-t-il souligné.

«Cet accord ne coûte rien aux contribuables», a dit à l'AFP un porte-parole du ministère de la Santé. «Il n'y a pas eu d'argent échangé, ce n'est pas un partenariat. Amazon a accès à de l'information sur le site du NHS».

Mais des défenseurs du droit à la vie privée s'alarment d'un éventuel stockage de données médicales à des fins commerciales.

Pour Silkie Carlo, directeur du groupe britannique Big Brother Watch Civil, le gouvernement se fourvoie en «encourageant le public à donner des détails personnels de santé à l'un des gloutons les plus agressifs en matière de traitement de données». Il dénonce une menace pour la «vie privée».

«Amazon ne partage aucune de ces informations avec des tiers, ne vend pas de produits ou ne fait pas de recommandations de produits sur la base de ces informations de santé, et ne crée pas de profil de santé pour les clients», a rétorqué le porte-parole du ministère.

Il a garanti que la société américaine n'aurait pas accès aux dossiers médicaux des Britanniques.

Un porte-parole d'Amazon a déclaré au journal The Times que les utilisateurs «contrôlaient leur historique» et pouvaient donc supprimer des enregistrements.

Amazon a mis en place un système de suppression facilité avec son dernier modèle d'enceinte : l'utilisateur peut demander directement à son assistant vocal d'y procéder, alors qu'il devait auparavant passer manuellement par l'application de son smartphone.

Existe-t-il des audios ineffaçables ? «On ne stocke pas l'audio des réponses d'Alexa. Toutefois, on peut stocker d'autres enregistrements des interactions d'Alexa avec le client» comme «une commande de pizza», a reconnu l'entreprise dans une lettre le mois dernier adressée à un sénateur américain.

Et si Amazon propose d'effacer les enregistrements, l'entreprise ne mentionne pas la possibilité d'interrompre la transmission des enregistrements.

Retour à la page d'accueil