Techno Espagne: l'extrême droite domine sur les réseaux sociaux

AFP

27.4.2019 - 09:12

Comme Donald Trump ou Marine Le Pen avant lui, le parti d'extrême droite espagnol Vox occupe et domine les réseaux sociaux à coups de débats enflammés, avant le scrutin de dimanche, selon des données consultées par l'AFP.

Cinquième force dans les sondages, Vox est leader sur les réseaux sociaux, avec en mars 33% de toutes les interactions («like», messages partagés, commentaires...) des comptes officiels des cinq principaux partis.

Soit bien davantage que les 24% du parti de gauche radicale Podemos, très actif sur les réseaux, selon l'outil de mesure Social Elephants consulté par l'AFP.

Le parti multiplie les messages ultranationalistes face aux indépendantistes catalans, contre l'avortement et l'euthanasie ou pour l'expulsion des sans-papiers.

Et les vidéos de son dirigeant Santiago Abascal, à cheval ou marchant sous la pluie dans la campagne en défenseur des traditions rurales, provoquent l'enthousiasme ou les critiques déchaînées sur les réseaux.

«Ils ont réveillé la bête», applaudissait un usager jeudi en réponse à une vidéo d'Abascal annonçant la fin d'une supposée «dictature gauchiste» en Espagne après les élections où Vox espère faire une entrée fracassante à la chambre des députés.

«Instant facho de Santiago Abascal. Va-t-on revenir à l'inquisition du national-catholicisme» de la dictature de Franco (1939-1975) ?, s'irritait un internaute, ajoutant «qu'est-ce qu'ils font peur».

- Faire parler, même en mal -

Se méfiant des médias traditionnels, Vox a opté «pour une stratégie de communication directe à travers les réseaux sociaux et de meetings très fréquentés», a résumé Abascal mercredi à la radio.

«Cela a été une clef du succès (...) comme dans d'autres lieux du monde», a ajouté le dirigeant du parti qui n'a accordé des interviews qu'à certains médias ciblés.

Vox, qui n'avait recueilli que 0,2% des voix aux dernières législatives de 2016, est désormais crédité de plus de 10% et d'une trentaine de sièges sur 350, selon les sondages.

Mais des analystes avertissent que son score pourrait être plus élevé, les indécis étant nombreux et ses électeurs ne révélant pas toujours leur véritable vote aux sondeurs.

«Ce qui leur importe, c'est que les gens parlent d'eux, même en mal», dit à l'AFP Ruben Durante, de l'institution catalane de recherches et d'études avancés (ICREA).

«Ces arguments polémiques attirent l'attention et finalement, ils gagnent, parce que leurs détracteurs ne voteraient pas pour eux» de toute façon, dit cet expert en réseaux sociaux et démocratie.

Sur Twitter, Vox a obtenu le mois dernier plus d'1,1 million d'interactions. Davantage que les 886.000 de Podemos et plus du double de celles des socialistes (551.000), des libéraux de Ciudadanos (499.000) et des conservateurs du Parti populaire (419.000), selon Social Elephants.

Les messages de Vox ont un grand rendement puisque le parti parvient à être leader en n'envoyant que 11 messages par jour en moyenne, quand Podemos en publie 27 et Ciudadanos 50.

Et ce, alors qu'il est le parti comptant le moins d'abonnés sur Twitter: 240.000 contre 1,37 million pour Podemos, 705.000 pour le PP, 670.000 pour les socialistes et 518.000 pour Ciudadanos.

- Cibler les démobilisés -

Les réseaux sociaux permettent en outre à Vox, comme aux autres partis, de pratiquer le «ciblage», dit M. Durante, c'est à dire identifier les potentiels électeurs et leur parler directement.

«Vox peut identifier les gens qui n'ont pas voté ou qui sont démobilisés mais ayant des centres d'intérêt particuliers comme la chasse (...) et cibler ces personnes pour qu'un euro dépensé (en communication) soit plus efficace», souligne M. Durante.

«Vox fait ça bien ça, Marine Le Pen l'a fait aussi en France, le Mouvement 5 étoiles en Italie (...) Donald Trump aux Etats-Unis», rappelle-t-il.

Vox avait d'ailleurs pris contact dès 2017 avec l'ancien stratège de Donald Trump, Steve Bannon, qui l'a reconnu récemment dans un entretien à El País.

Les messages sur les réseaux ou via l'application de messagerie WhatsApp – très utilisée en Espagne – pénètrent mieux car ils sont partagés par des proches.

«C'est un élément clef, parce que dans un environnement où on est en confiance, on leur accorde plus de crédibilité», souligne Silvia Martínez, experte en réseaux sociaux à l'Université ouverte de Catalogne.

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