Shin Jang-jin, vendeur de caméras espion, le 22 mars 2019 dans son magasin d'Incheon, en Corée du Sud
hin Jang-jin, vendeur de caméras espion, le 22 mars 2019 dans son magasin d'Incheon, en Corée du Sud
Une paire de lunette dotée d'une caméra espion exposée le 22 mars 2019 dans un magasin spécialisé d'Incheon (Corée du Sud)
Une caméra caché dans un briquet exposé le 22 mars 2019 dans un magasin spécialisé d'Incheon, en Corée du Sud
Photo de smartphone en cours de chargement prise le 18 mars 2019 à Washington
Les vendeurs de caméras espion sur la sellette en Corée du Sud
Shin Jang-jin, vendeur de caméras espion, le 22 mars 2019 dans son magasin d'Incheon, en Corée du Sud
hin Jang-jin, vendeur de caméras espion, le 22 mars 2019 dans son magasin d'Incheon, en Corée du Sud
Une paire de lunette dotée d'une caméra espion exposée le 22 mars 2019 dans un magasin spécialisé d'Incheon (Corée du Sud)
Une caméra caché dans un briquet exposé le 22 mars 2019 dans un magasin spécialisé d'Incheon, en Corée du Sud
Photo de smartphone en cours de chargement prise le 18 mars 2019 à Washington
Il n'y a à première vue rien de bien méchant dans les stylos, briquets, cadres et détecteurs de fumée qu'écoule Shin Jang-jin dans son magasin d'Incheon. Ces objets sont pourtant au centre d'un énorme scandale en Corée du Sud car ils dissimulent tous une minuscule caméra espion.
Ces dix dernières années, M. Shin a vendu des milliers de gadgets du genre. Mais son commerce prend de plein fouet le ras-le-bol d'une partie de la population sud-coréenne face à l'épidémie de «molka», ce phénomène qui voit des hommes installer des caméras espion afin de filmer des femmes à leur insu dans des lieux publics.
M. Shin défend ses lentilles d'un millimètre de diamètre, utiles pour capter des preuves de violences conjugales, de violences contre les enfants. Et il explique à l'AFP avoir déjà refusé de servir des clients dont le but était d'espionner des femmes dans les toilettes.
«Ils pensaient qu'en tant qu'homme, je les comprendrais», raconte-t-il. «Je leur ai dit de partir».
Mais cet homme de 52 ans reconnaît bien volontiers qu'il ne peut pas toujours deviner les intentions de ses clients.
Il avait d'ailleurs été entendu en 2015 par la police quand un de ses produits -- une caméra dissimulée dans une coque de téléphone portable -- avait servi à filmer en cachette des femmes dans le vestiaire d'un parc aquatique proche de la capitale.
L'objet avait été vendu à une femme. Et jamais il n'aurait pensé qu'il allait servir à fabriquer et mettre en ligne de telles images.
- Scandale dans les hôtels -
Les personnes qui achètent des caméras espion ne sont pas tenues par la loi de donner leur identité, ce qui rend quasi impossible de déterminer à qui appartiennent ces dispositifs, ou l'usage que les acheteurs en font.
L'onde de choc provoquée par l'inflation du nombre de vidéos à caractère sexuel filmées en caméra cachée a poussé des parlementaires à déposer un projet de loi qui exigerait que les acheteurs laissent leurs informations personnelles sur une base de données du gouvernement. Une initiative qui suscite la panique des distributeurs comme M. Shin.
L'affaire a pris une ampleur telle que des policières inspectent désormais les toilettes publiques pour vérifier qu'elles ne sont pas sous l'oeil d'une de ces caméras.
La police vient de révéler que plus de 800 couples avaient été filmés à leur insu lors de relations sexuelles par des caméras dissimulées dans dans les porte sèche-cheveux, les prises murales ou les téléviseurs de 42 chambres de 30 motels.
La «vengeance porno» sur internet est également fréquente. La plupart du temps, c'est le fait d'hommes vindicatifs qui mettent en ligne des vidéos de leurs relations sexuelles avec leur ex.
Jung Joon-young, une star de la K-pop, vient d'ailleurs d'être arrêté pour avoir filmé ses relations sexuelles à l'insu de ses partenaires et diffusé les vidéos.
Le nombre d'infractions impliquant des caméras cachées a explosé ces dernières années, puisqu'on est passé de 2.400 plaintes en 2012 à plus de 6.500 en 2017.
A en croire les statistiques, 98% des personnes condamnées sont des hommes et plus de 80% des victimes sont des femmes.
- «La tromperie pour seul but» -
«Je refuse des clients quand ils ne sont pas clairs sur ce qu'ils veulent faire de la caméra», assure aussi à l'AFP Lee Seung-yon, qui tient un magasin à Séoul, conscient que sa méthode n'est pas infaillible.
M. Shin redoute de son côté que le projet de loi à l'étude ne lui fasse perdre des clients.
«Plus de 90% des crimes commis par caméra cachée le sont avec les téléphones portables, et pas avec les objets spécialisés», avance-t-il. Pour lui, mettre en cause les objets qu'il vend revient à imputer les meurtres à l'arme blanche aux fabricants de couteaux.
Aucun chiffre officiel ne peut confirmer l'estimation de M. Shin. Mais un responsable de la police a convenu auprès de l'AFP que «la plupart» des vidéos tournées en caméra cachée avaient été faites à l'aide de smartphones.
Pour les organisations féministes, l'argument est trompeur car nombre de films sont faits par des caméras dissimulées dans des objets du quotidien.
De plus, les smartphones vendus en Corée du Sud ont un dispositif sonore lors de l'utilisation de l'appareil photo, justement pour empêcher les images volées, relèvent ces associations.
Mais de nombreux auteurs de vidéos illégales utilisent des dispositifs dernier cri ou des applications parvenant à étouffer ce son.
«Dans la plupart des cas, les victimes ne réalisent qu'elles ont été filmées qu'après que les images aient été partagées alors que les infractions commises avec des smartphones sont beaucoup plus faciles à déceler», explique Lee Hyo-rin, du Centre coréen de lutte contre les cyberviolences sexuelles.
«Le seul but de ces gadgets est la tromperie.»
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