Techno Taxify, soutenu par le chinois Didi, veut l'argent d'Uber

AFP

5.10.2017 - 12:56

Paris (AFP)

Conquérir jusqu'à un tiers du marché très disputé des VTC parisiens en un an, tel est l'objectif du nouveau venu Taxify qui, fort du soutien du colosse chinois Didi, courtise les chauffeurs et promet des prix réduits.

En ligne de mire de Markus Villig, le très jeune (23 ans) PDG de cette entreprise estonienne qui revendique une présence dans 19 pays et trois millions de clients: la prééminence d'Uber sur les voitures de transport avec chauffeur dans la capitale.

"Paris est essentiellement dominée par une société américaine. Nous voulons prouver que des entreprises européennes peuvent aussi arriver, conquérir une part de marché significative et faire un peu de concurrence", explique M. Villig dans un entretien à l'AFP.

Uber, plateforme de réservation de VTC qui a bouleversé depuis 2009 le secteur du transport individuel avec son application au succès mondial, a connu plusieurs revers ces derniers mois, entre départ de son PDG, controverses de ressources humaines et révocation de sa licence londonienne.

Le Californien, valorisé à quelque 70 milliards de dollars, a perdu 2,8 milliards en 2016 sur un chiffre d'affaires de 6,5 milliards et est resté dans le rouge au premier semestre 2017 même si l'hémorragie s'est réduite.

Mais selon M. Villig, Uber est "très rentable à Paris", où l'entreprise américaine est néanmoins en conflit avec plusieurs syndicats de chauffeurs qui réclament une meilleure rémunération.

Disant ne pas vouloir d'une plateforme "où seuls les clients sont contents mais qui fait descendre les chauffeurs dans les rues", M. Villig promet de ne prendre que 15% de commission sur la course, contre 25% pour Uber.

Avec ce modèle, Taxify est rentable depuis l'année dernière, affirme son PDG, évoquant un chiffre d'affaires de l'ordre de plusieurs dizaines de millions d'euros mais restant discret sur ses bénéfices.

Il assure en outre que les tarifs de Taxify, qui ouvre son service jeudi à Paris, seront de 10% inférieurs à ceux de l'entreprise américaine. Pendant un mois de lancement, ils seront même réduits de moitié.

- Doute syndical sur le modèle -

"Dans les autres pays où nous sommes entrés plusieurs années après Uber, nous avons montré que nous pouvions atteindre entre 20 et 30% de part de marché en un an, nous espérons parvenir à quelque chose de similaire en France", assure M. Villig.

Paris, démontre-t-il, "est l'un des plus gros marchés au monde" pour les taxis et VTC. "Pour nous, il est extrêmement important d'être là".

Si M. Villig évoque 5.000 chauffeurs parisiens pré-inscrits pour son service, soit environ le tiers de la profession, le secrétaire général du syndicat des chauffeurs privés-VTC, Sayah Baaroun, émet des doutes quant au modèle économique de la société.

"Si Uber ne s'en sort pas en prenant 25%, l'autre va débarquer avec 15%, vous pensez qu'il va s'en sortir?", lance-il, interrogé par l'AFP. Pour les chauffeurs, il prédit dans les mois à venir une "belle euphorie, parce que (Taxify) va mettre des primes, chacun essaiera d'acheter des chauffeurs de son côté".

Mais à long terme, "on sait très bien que dans les autres pays du monde où Uber et Didi sont en concurrence, les chauffeurs ne vivent pas bien", remarque-t-il, militant pour refonder les relations entre plateformes et chauffeurs.

Si les ambitions de Taxify peuvent être prises au sérieux, c'est parce que l'entreprise a reçu cet été un investissement du géant chinois du VTC et du taxi, Didi Chuxing, à hauteur d'un peu moins de 20%, selon M. Villig.

L'entreprise, qui avait racheté l'an dernier les opérations d'Uber en Chine à l'issue d'une bataille longue et ruineuse, affirme contrôler aujourd'hui 90% du marché des VTC dans son pays et a levé au printemps plus de cinq milliards de dollars, en faisant la start-up la mieux valorisée d'Asie.

Didi Chuxing, né en 2015 de la fusion de deux applications concurrentes soutenues respectivement par les géants chinois de l'internet Alibaba et Tencent, assure compter 400 millions d'usagers.

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