Les hashtags «#Me too» et #Balancetonporc» se sont popularisés sur la toile et multipliés avec d'autres mots-dièse
Des badges meetoo en vente à Washington le 19 janvier 2019
Trois ans après #Metoo, les hashtags devenus incontournables des combats féministes
Les hashtags «#Me too» et #Balancetonporc» se sont popularisés sur la toile et multipliés avec d'autres mots-dièse
Des badges meetoo en vente à Washington le 19 janvier 2019
#JAiEtéViolée, #JaiPasDitOUi, #JeSuisVictime: la multiplication récente des mots-dièse recensant force témoignages de violences sexuelles subies par les femmes a prolongé l'effet #Metoo mais aussi révélé que les combats féministes se mènent désormais à coup de stratégies de communication sur les réseaux sociaux.
Près de trois ans après la déferlante #Metoo, et son dérivé français #Balancetonporc, une nouvelle vague de témoignages a envahi Twitter ces derniers jours avec le hashtag #JeSuisVictime.
«J'avais 7 ans, 17 ans et 19 ans. #JeSuisVictime», dévoile par exemple une jeune femme. «#JeSuisVictime de viol. Une fois à mes 9 ans. Une autre fois à mes 14 ans. On récompense les coupables. On condamne les victimes», tweete une autre.
Le premier message est apparu au lendemain de la cérémonie des César, le 28 février, qui a sacré meilleur réalisateur le cinéaste Roman Polanski, visé par plusieurs accusations de viol.
En six jours, plus de 200.000 messages ont été publiés avec ce mot-clé, selon un décompte réalisé par l'outil de veille des médias sociaux Visibrain. Soit presque autant que #Balancetonporc, qui avait généré en octobre 2017 quelque 208.000 messages pendant le même laps de temps.
Rendant une nouvelle fois visibles des faits subis en majorité par des femmes, ce hashtag a rejoint la liste des récents #JAiEtéViolée, #JaiPasDitOui, ou encore #Monpostpartum, qui compile des témoignages sur les difficultés de l'après-accouchement, une période intime très rarement abordée.
«Tous ces hashtags sont à la fois symboliques et plein de force», estime la militante féministe Rebecca Amsellem.
Pour cette docteure en économie, fondatrice de la newsletter les Glorieuses, ces témoignages sous le même mot-clé permettent de «rendre les histoires visibles dans l'espace public. Les femmes disent stop, pour tout un tas de choses et elles ne s'arrêteront pas».
A l'heure où le combat féministe se diversifie, elle constate que les collages – ces phrases fortes inscrites en grandes lettres noires sur les murs des villes – et les hashtags sont les deux modes d'actions qui trouvent actuellement le plus d'écho.
Sans doute portés par l'effet de #Metoo, nombre de collectifs féministes font émerger leurs propres hashtags pour «créer l'actualité».
«Le but est d'atteindre les top tweets», c'est-à-dire le classement des messages les plus populaires, ceux qui ont un grand nombre d'utilisateurs, explique à l'AFP Caroline De Haas, membre du collectif #Noustoutes.
«Quand vous êtes dans le top, vous générez de la parole dans l'espace public et des articles de presse, car les journalistes vous appellent», constate cette militante de longue date, à l'initiative du récent #JAiPasDitOui, qui vise les actes sexuels non consentis.
Quand ils ne sont pas spontanés, ces mots-dièse souvent percutants «font partie d'une stratégie de com' pour être visible et rassembler le plus grand nombre», reconnaît-elle. «Mais ça ne fonctionnerait pas, s'ils ne résonnaient pas avec une réalité sociale».
- «Statut de victime» -
En réponse à la vague des témoignages, la police nationale a appelé cette semaine dans un tweet à «déposer plainte».
«Pour les militants, cela a un sens d'être sur Twitter car c'est là où il y a les journalistes, les leaders d'opinions et les politiques», analyse Véronique Reille-Soult, présidente de Dentsu consulting, spécialiste de l'opinion.
Les réseaux sociaux «donnent l'impression que tout le monde peut participer à ce combat (féministe) car ils offrent une caisse de résonance» et sont «simples d'utilisation», précise-t-elle.
Ces mots-clés permettent alors de se retrouver sur une même problématique tout en captant de nouvelles militantes potentielles. Ce qui pose la question du passage du virtuel à la réalité.
«Il faut proposer des débouchés, des actions concrètes à mener ensemble», insiste Caroline De Haas, qui a accentué cette semaine la communication sur la marche organisée dimanche à l'occasion de la Journée des Droits des femmes, espérant attirer davantage de monde.
Car si cette parole sur internet est «capitale», elle ne doit pas «enfermer les femmes dans un statut de victime», a mis en garde vendredi l'historienne Michelle Perrot.
«Les femmes qui protestent doivent rester actrices et s'emparer du mal qui leur est fait pour dire leur droit», a-t-elle déclaré sur France inter, craignant que la victimisation n'ouvre la porte à «des risques de domination».
Retour à la page d'accueil