Revue de presse Comment expliquer la débâcle des Vert-e-s ?

bu, ats

23.10.2023 - 07:29

A l'issue des élections fédérales de dimanche, les journaux romands tentent de comprendre la débâcle des Vert-e-s. Le Temps et l'Agefi appellent le vainqueur, l'UDC, à laisser ses provocations au vestiaire et à enfin assumer ses responsabilités.

Les journaux romands tentent de comprendre la débâcle des Vert-e-s.
Les journaux romands tentent de comprendre la débâcle des Vert-e-s.
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Keystone-SDA, bu, ats

A l'issue des élections fédérales de dimanche, les journaux romands tentent de comprendre la débâcle des Vert-e-s. Le Temps et l'Agefi appellent le vainqueur, l'UDC, à laisser ses provocations au vestiaire et à enfin assumer ses responsabilités. Certains éditorialistes désignent le Centre comme le vrai vainqueur du scrutin.

Comment expliquer le raté des Vert-e-s? se demande le Nouvelliste. La faute aux colleurs de mains et autres perturbateurs du trafic automobile? Aux taxes antisociales? Au «wokisme» attribué à certains militants? Aux discours de décroissance? Ou simplement aux autres préoccupations du moment, pouvoir d’achat et migration en tête?

Quelle qu’en soit la raison, ce recul doit profondément remettre en cause la stratégie des écologistes s’ils espèrent convaincre plus largement à l’avenir. Oser un discours de l’espoir, plutôt que celui des interdits et de la culpabilisation.

Cette gifle électorale ne doit toutefois pas servir d’excuse aux autres partis pour abandonner tout effort en faveur d’une politique climatique ambitieuse, écrit encore le journal valaisan.

Pour la Liberté, le fait que les écologistes et les Vert’libéraux boivent la tasse «et perdent une bonne part des positions acquises dans l’euphorie environnementale d’il y a quatre ans» n’est pas une surprise, car la dernière législature a été le théâtre d’un basculement d’époque.

Les Vert-e-s paient aussi au prix fort un éparpillement de leurs priorités, selon le quotidien fribourgeois. Plutôt que de se concentrer sur la lutte contre le réchauffement climatique, ils se sont égarés dans des thèmes sociétaux comme l’écriture inclusive, rendant leur message peu audible et brusquant une part de leur électorat.

Les Vert-e-s ont péché par orgueil

Pour 24 Heures, les Vert-e-s ont péché par orgueil. «On le sait, en période d’instabilité, la population se tourne vers les partis traditionnels. Et compte tenu des thématiques, l’UDC en profite le plus».

Mais ce contexte difficile n’est pas la seule clé pour comprendre cette déconfiture. Le parti paie aussi l’excès de confiance que lui a conféré la vague verte. L’échec des Vert-e-s est celui d’un parti qui n’a pas encore fait le choix entre militantisme et pragmatisme, estime 24 Heures.

Des Vert-e-s «moralisateurs»

La Tribune de Genève dépeint pour sa part des Vert-e-s moralisateurs. En insistant sur le climat mondial, sur les thèmes de société comme la race, le genre ou la consommation de viande, en faisant la morale à tout le monde, les Vert-e-s se sont égarés, estime le quotidien du bout du lac.

Les Vert-e-s ont des idées sur le climat, les transports, les inégalités. Ils n’arrivent plus à les rendre audibles. Une profonde introspection s’impose, un changement de style aussi, insiste la Tribune.

L'UDC doit prendre ses responsabilités

Le Temps s'intéresse lui à l'UDC, «qui ne peut plus se contenter de gagner». Confirmé comme première force du pays, le parti conservateur doit prendre ses responsabilités et ne pas seulement diviser, appelle le quotidien romand.

Le Temps l'invite à nouer de véritables alliances constructives. Les parlementaires UDC devraient s’inspirer davantage de leurs deux conseillers fédéraux qui savent, eux, trouver des compromis. D’autant plus que ce succès de l’UDC ne s’accompagne pas d’une droitisation générale du parlement, contrairement à 2015.

Idéologie décroissante de l'UDC

L'Agefi craint pour sa part l'idéologie «décroissante» de l'UDC, peu favorable à la prospérité. Le parti agrarien s'inscrit ainsi dans la mouvance malthusienne qui portait déjà l’initiative Ecopop, en liant protection de l'environnement et limitation de l’immigration.

Répondre par des discours rassurants, mais simplistes, aux préoccupations de la population face à de vrais problèmes – comme ceux engendrés par l’immigration – peut certes aider à être élu, remarque l'Agefi. Avant d'ajouter que le travail d’un parlementaire consiste ensuite à répondre aux défis auxquels la Suisse est confrontée.

Les glaciers, les femmes et les migrants et migrantes ont du souci à se faire, écrit le Courrier. Cette remontée de l’extrême droite s’inscrit dans une tendance lourde que l’on observe ailleurs en Europe.

La boussole d'antan

En Suisse alémanique, plusieurs journaux rendent également les Vert-e-s responsables de leur propre échec, alors que les records de température des derniers mois jouaient en leur faveur.

Selon le Tages-Anzeiger, les Vert-e-s se sont largement déconnectés de la majorité de la société avec des actions jugées trop extrêmes. En tout cas, le rêve du siège des Vert-e-s au Conseil fédéral semble être pour longtemps révolu, conclut le quotidien alémanique,

Même analyse du côté de la Basler Zeitung. Mais parallèlement, l'UDC a retrouvé sa boussole politique d'antan en ciblant les étrangers et les migrants, marquant des points auprès d'un électorat déstabilisé et en colère. Tant que l'ensemble des politiciens de gauche continueront à nier et enjoliver de la sorte le problème des étrangers et des migrants, le sentiment de colère continuera à profiter à l'UDC, sermonne le quotidien bâlois.

Pour la Südostschweiz, le changement climatique a été relégué au second plan derrière la guerre en Ukraine et la crise de l'énergie qui s'en est suivie. L'UDC en a profité en associant les réfugiés ukrainiens à l'augmentation des coûts du logement, de la vie et de l'énergie en Suisse, écrit le journal.

Une victoire du Centre ?

La Neue Zürcher Zeitung estime elle que des temps difficiles se présagent pour le libéralisme, car en période d'incertitude, la population réclame plus d'Etat et non pas plus de responsabilités individuelles. Le virage à droite au parlement ne signifie pas nécessairement plus de politique bourgeoise, écrit le quotidien.

Le site Watson appelle l'UDC à faire mieux qu'en 2015: «attiser les peurs (des étrangers) a toujours été la compétence clé de l'UDC. Par contre dès qu'on lui demande de trouver des solutions pour des problèmes concrets, l'UDC débite des phrases vides de sens».

Au-delà de la victoire de l'UDC et de la débâcle écologiste, le vrai vainqueur du scrutin de dimanche est le Centre, affirme pour sa part l'Aargauer Zeitung. En effet, ni la droite ni la gauche n'auront de majorité lors de la nouvelle législature. Dans ce contexte, l'ex-PDC jouera le rôle le plus important, celui de «faiseur de majorité», analyse le journal du groupe CH Media.