«Continuer de vivre avec le virus» «Critiquer le Conseil fédéral? Ce serait beaucoup trop facile»

D'Anna Kappeler

25.9.2020

Outre la paroi en plexiglas, Fritz Haenni, chauffeur de bus, est reconnaissant pour une chose: «Chez nous, personne n’a dû partir, nous avons conservé tous les emplois.»
Outre la paroi en plexiglas, Fritz Haenni, chauffeur de bus, est reconnaissant pour une chose: «Chez nous, personne n’a dû partir, nous avons conservé tous les emplois.»
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Depuis six mois maintenant, le coronavirus oblige tout le monde à changer son quotidien. Fritz Haenni, chauffeur de bus, explique pourquoi il est satisfait de la présence d’une vitre en plexiglas. Et pourquoi il n’aime pas rejeter la faute sur le gouvernement.

«Je vais très bien, heureusement. Je suis préoccupé par la hausse du nombre de cas au cours des dernières semaines, j’espère qu’il n’y aura pas de reconfinement. Même si personne en Suisse ne pourra plus se le permettre. Le Conseil fédéral ne laissera pas les choses en arriver là. Je n’ai pas peur, je suis bien trop pragmatique pour cela.

Je travaille à 100% comme chauffeur de bus à Fribourg pour les Transports publics fribourgeois (TPF). Pour moi, la plus belle chose, c’est que les gens sont de retour dans la rue et dans les bus. Cela n’a rien à voir avec les services de nuit au cours desquels je devais traverser une ville de Fribourg fantomatique et déserte. Non, non, ce n’était pas ma tasse de thé. Heureusement, ce n’est plus ce genre de ville de zombies.

Mais oui, parfois, on en a juste assez de ce fichu virus. Même si aux TPF, nous avons de la chance: la coopération avec la direction s’est très bien passée dès le début de la crise du coronavirus

S’il fallait conduire avec un masque, l’ambiance serait plus tendue

Par exemple, une semaine avant que le Conseil fédéral n’impose l’obligation du port du masque dans les transports publics, nous avions déjà pu trouver une autre solution pour nous, les chauffeurs. Nous avons fait installer des parois en plexiglas dans chaque bus pour protéger les chauffeurs d’une éventuelle infection par les passagers. Conduire un bus avec un masque, ça donne un mal de tête atroce, ce n’est pas possible.

A propos
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Fritz Haenni est chauffeur de bus à Fribourg pour les Transports publics fribourgeois (TPF). Agé de 57 ans, il est également président de section du Syndicat du personnel des transports (SEV).

Je suis aussi formateur, et logiquement et à juste titre, nous portons aussi un masque parce que nous ne pouvons pas maintenir la distance de sécurité entre nous. C’est pourquoi je sais ce que c’est que de conduire avec un masque. Surtout pour ceux qui portent des lunettes dont les verres ne cessent de s’embuer, cela n’a rien d’amusant.

S’il fallait conduire avec un masque, je suis sûr que l’ambiance serait tout autre. A l’heure actuelle, elle est bonne, on s’arrange.

Je vois cela à travers ma compagne qui tient un salon de coiffure. Elle et son personnel doivent porter un masque toute la journée. C’est vraiment éprouvant, elle a beaucoup de maux de tête depuis. Récemment, elle m’a expliqué qu’elle envoyait désormais souvent son personnel se promener à l’air libre sans masque.

«Je suis content que les passagers respectent l’obligation du port du masque dans le bus. Faire la police, ce n’est pas pour moi.»

D’ailleurs, je suis content que les passagers respectent l’obligation du port du masque dans le bus, à quelques exceptions près. Faire la police, ce n’est pas pour moi. En fait, nous les conducteurs, nous avons été étonnés de la facilité avec laquelle les gens s’adaptent. Ça s’est produit du jour au lendemain, c’est vraiment super. Le contrôle social semble fonctionner. Même ceux qui voyagent de nuit s’y tiennent dans des proportions convenables. Il est très rare que je dise à quiconque de mettre un masque.

Chez nous, personne n’a perdu son emploi

Je suis très reconnaissant pour une chose: chez nous, personne n’a dû partir, nous avons conservé tous les emplois. Cela n’a rien d’évident. Même les conducteurs appartenant aux groupes à risque ont pu reprendre leur travail dans une large mesure. Ceci est également dû au fait que le Conseil fédéral a retiré certains groupes à risque de la liste, comme les personnes atteintes de diabète. C’est une bonne chose.

«Critiquer rétrospectivement le Conseil fédéral pour son travail? Non, certainement pas. Ce serait beaucoup trop facile, je ne suis pas ce genre de type.»

Outre mon métier de chauffeur, je suis toujours président de la section TPF du Syndicat du personnel des transports (SEV). Et depuis le déconfinement, il n’y a pas moins de travail, mais encore plus. Actuellement, les incertitudes après les vacances sont au centre des préoccupations. J’indique aux gens s’ils doivent respecter une quarantaine et pendant combien de temps, en fonction de leur lieu de vacances. Cela cause beaucoup d’ennuis. L’OFSP propose un bon site d’information à ce sujet, mais il est compliqué de savoir ce qui s’applique exactement.

Mieux vaut voir le verre à moitié plein

Je suis de ceux qui préfèrent voir le verre à moitié plein plutôt qu’à moitié vide. Heureusement pour moi, en tant que président de section syndicale. Sinon, je ne pourrais pas occuper ce poste, pas en ces temps.

Mais il est vrai qu’à l’heure actuelle, il est question d’emplois. La vie avec le virus, on en a encore pour longtemps, c’est pour cela que je suis assez réaliste. Ce n’est que le début de la fin pour les petits commerces. Beaucoup de gens n’achètent qu’en ligne, c’est vraiment un problème. Je ne trouve pas ce comportement durable, j’aimerais que les gens ici aient un mode de réflexion plus social. Je connais suffisamment de personnes qui perdent leur emploi en ce moment.

Critiquer rétrospectivement le Conseil fédéral pour son travail? Non, certainement pas. Ce serait beaucoup trop facile, je ne suis pas ce genre de type. Le coronavirus était nouveau pour nous tous. Il nous a tous surmenés et nous avons dû nous adapter. Je pense que le Conseil fédéral et surtout le ministre de la Santé Alain Berset et la présidente de la Confédération Simonetta Sommaruga se sont pas mal débrouillés.»

Mini-série «Continuer de vivre avec le virus»

Il y a six mois, le 16 mars 2020, le Conseil fédéral a décrété un semi-confinement; la Suisse s’est alors retrouvée pratiquement à l’arrêt. Dans les semaines qui ont suivi, «Bluewin» a invité diverses personnes à raconter leur nouveau quotidien dans une série d’articles. Mais comment vont ces gens aujourd’hui? Deux de ces personnes se confient dans la mini-série «Continuer de vivre avec le virus».

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